Elle s'appelait Marie-Anne Etchemendy (VI)
Pierre et Marie-Anne Eppherre ~ ca 1960 Collection particulière © Mdep |
A 16 ans, brevet des collèges en poche, Dominique quitte sa famille pour voler de ses propres ailes. Il débarque à Bordeaux où il est accueilli chez la plus jeune sœur de Marie-Anne, Véronique, rue Belle Etoile près de la gare Saint-Jean. Sa cousine Eléonore, 7 ans, fille unique de sa tante Véronique, est ravie d'avoir un "grand frère" à la maison.
Grâce au mari de sa tante, Charles Cazaux, il décroche un petit boulot de barman aux Capucins, le "ventre de Bordeaux". Le dimanche, son seul jour de libre, et seulement après la messe et le déjeuner dominical, il se rend parfois au stade de rugby de Bègles de l'autre côté des Boulevards, pour admirer son héros "Bambi" Moga.
A Mauléon, ses parents ont quitté les allées pour un appartement plus grand et surtout plus moderne dans le nouveau quartier près de la gare qui donne sur le Gave de Mauléon. Pour la première fois de sa vie, Marie-Anne a sa propre salle de bain et une baignoire !
Pierre prend sa retraite de cheminot en 1956. Il a 55 ans mais va encore travailler plusieurs années comme semellier dans la fabrique d'espadrilles Cherbero. Les conditions de travail sont dures, les semelles en corde que manipulent les ouvriers sont en chanvre dont la poussière s'avère très toxique.
A Bordeaux, dès qu'il en a l'âge, Dominique s'engage dans l'armée de terre et part faire l'école des sous-officiers de Cherchell, en Algérie. C'est dans ce pays qui se prépare à une guerre de huit ans qu'il rencontrera ma mère deux ans plus tard.
Jean, son cadet, quitte à son tour Mauléon et ses parents pour s'enrôler dans l'armée de l'air et s'envole pour le Sahara Marocain. Il reviendra régulièrement dans la Soule où à 30 ans, il rencontrera sa future femme, une jeune fille espagnole venue des Asturies.
Le 19 août 1970 Pierre Eppherre s'éteint à l'hôpital d'un cancer du poumon à 68 ans. Avec le recul, mon père pense que ce n'est pas la cigarette qui l'a tué, c'était un fumeur modéré (le tabac était cher surtout pendant la Guerre !) mais son dernier travail à l'usine.
Les dernières années de Marie-Anne
Avec mes grands-parents à Mauléon Collection particulière © Mdep |
A cette époque, notre famille s'est installée dans la banlieue bordelaise, mon père ayant obtenu sa mutation pour se rapprocher de sa mère malade. Etudiante, je ne lui ai rendu que de trop rares visites. Aujourd'hui, je regrette tellement de ne pas l'avoir mieux connue...
Marie-Anne décède le 2 avril 1977 d'une encéphalite virale, deux mois avant ses 65 ans.
Epilogue
De la génération de mes grands-parents, il ne reste plus personne. De celle de mon père, plus grand monde non plus. En 1991 et 1999, Dominique a perdu ses deux cousins préférés Jean-Pierre Curutchet et Michel Eppherre. Fin 2001, son frère Jean, mon parrain, décède à son tour. Il est inhumé au cimetière de Mauléon aux côtés de ses parents.
Collection particulière © Mdep |
Papa va aujourd'hui sur ses 89 ans. Quand il retourne à Aussurucq il n'est pas peu fier de s'entendre appeler par ses petits cousins Dominique Zukot* zaharra, "l'ancien" en basque. Sa mémoire est intacte et désormais, il évoque volontiers ses souvenirs d'enfance. Et cette fois, je l'écoute...
"Norat joan jakiteko, nundik jin jakin behar."
Pour savoir qui l'on est, il faut savoir d'où l'on vient.
Fin
*Au Pays basque, les gens sont souvent appelés par le nom de leur maison. Mon père enfant ayant vécu dans la maison de sa marraine, "Zubukota", il est devenu pour le village Dominique Zukot.
Sources : AD64, Wikipedia, Ikerzaleak, archives familiales, mémoire de mon père...
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